La maison Borniol

Chanson mortelle : la Maison Borniol, Thiéfaine

L’été est propice à se détendre et à écouter de la musique en sirotant des cocktails sur un bord de mer ou de piscine. Et nous ne pouvons résister au plaisir, tous les vendredis, de vous suggérer une chanson pour votre playlist. Sur le thème de la mort, parce que nous sommes incorrigibles. Et on commence par Hubert Félix Thiéfaine, et la Maison Borniol.

Les temps sont durs, c’est pas mariole

En 1978 sort l’album « Tout corps vivant branché sur le secteur est appelé à s’émouvoir », premier disque d’un jeune chanteur, Hubert Félix Thiéfaine. Il s’ouvre dur un titre représentatif du style de son auteur, entre propos cryptiques, surréalisme et dérision, « l’ascenseur de 22 H 43 » et contient bon nombre de titres qui resteront dans les annales, comme le magnifique « Je t’en remet au vent ».

Album orienté très folk, avec des touches de rock, l’album se vendra à 3000 exemplaires lors de sa sortie, le style surréaliste de l’auteur le rendant difficilement abordable à l’époque. Les textes de Thiéfaine sont cryptiques, parfois complexes, en pleine période disco et deux ans avant l’arrivée de la new-wave avec ses ritournelles simples et ses textes faciles à retenir.

Une seule chanson connaîtra les honneurs d’un passage à la radio : « La fille du coupeur de joints », qui deviendra au fil des années un classique du chanteur.

Né à Besançon, Thiéfaine, après des études de droit et de psychologie, part à Paris tenter sa chance après avoir toujours pensé qu’il serait chanteur ou prêtre. Il écume les cabarets pendant dix ans, vivant la plupart du temps dans la misère, comme il le raconte lui-même, avant la sortie de son premier album, suivi de deux autres en 1979 et 1980, qui lanceront sa carrière.

Dans ce premier album, un titre souligne le goût de l’auteur pour l’humour noir : « La maison Borniol », prenant directement son nom de Henri de Borniol, prestigieuse société de pompes funèbres spécialisée dans le protocole, aujourd’hui propriété du groupe OGF.

Le morceau commence par une parodie de musique sinistre, presque grand-guignol, où le personnage est introduit. Le texte est parlé, l’auteur y interprète le personnage de Borniol, qui explique qu’il vient livrer le cercueil, d’une voix pâteuse d’ivrogne, détaillant ses services.

Avant de commencer à chanter une pseudo-complainte satirique pleine d’humour macabre (« les temps sont dur, c’est pas mariole, vivement que revienne le choléra » ou « cercueils à fleurs, pour les pauvres mêmes, ou à roulettes, pour les vieillards »).

En 2018, lors de sa tournée « 40 ans de chansons sur scène », Thiéfaine choisit la « maison Borniol » pour clôturer son concert, petites lunettes noires et chapeau haut de forme, devant un public enthousiaste, démontrant que le morceau est, lui aussi, devenu un classique.

Guillaume Bailly

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