Au cours de ses pérégrinations dans les cimetières de différentes régions du monde, R. Harvey médite sur la représentation qu’ils donnent de la mort et sur le sort qu’ils réservent aux « gisants ».
Il est difficile de trouver le ton juste pour parler de la mort : trop souvent, on prend un ton solennel que l’on croit approprié à la gravité du sujet. Depuis le Phédon de Platon, on nous enseigne que « philosopher c’est s’exercer à mourir », et depuis Être et temps de Heidegger, que nous n’accédons à une « existence authentique » que dans l’anticipation de notre « être-pour-la-mort ». Mais bien souvent, le discours des philosophes sur la mort semble abstrait, désincarné, dissocié du souvenir concret des morts, des défunts dont nous portons le deuil — ce que la philosophie abandonne volontiers à la littérature. Pourtant, il est sans doute impossible de parler de manière juste de la mort sans parler aussi des morts, sans évoquer leur souvenir, leur visage, leur voix, leur nom.