Parfois, en pleine nuit, on reçoit des appels désespérés à la permanence des pompes funèbres. Avant, on y allait en se servant d’un plan. Puis le GPS est apparu. Tout a toujours été simple. Pardon : tout a toujours été presque simple….
Mais t’es pas là, mais t’es où ?
L’appel tomba à 23 Heures à la permanence funéraire. A téléphone, une vielle dame, en larmes.
« Oh, Monsieur, mon mari est décédé »
Le conseiller funéraire présenta ses condoléances et essaya de rasséréner la dame. Il posa les questions d’usage, le médecin était passé, le défunt reposait à son domicile, la veuve souhaitait un transfert vers la maison funéraire, il fallait venir le chercher. Après avoir assuré la dame qu’ils arrivaient, il posa la question simple « A quelle adresse, madame ? »
C’était dans un petit village, non loin. Mais il y a avait un os.
« Je ne sais pas, Monsieur » répondit la mamie.
« Vous ne connaissez pas votre adresse, Madame ? » demanda le conseiller.
« Ils viennent de changer le nom de la rue, et des lotissements alentours. Je ne me rappelle plus le nouveau nom. C’était un président, je crois… »
« Rue Chirac ? Rue Mitterrand ? Rue de Gaulle ? Rue Giscard ? »
« Non, non, je en sais pas si c’était un président… »
« De quelle république, le président, Madame ? »
« Ben… De la république française, évidemment ! »
Le conseiller soupira. « Essayez de vous concentrer, Madame. Donnez-moi le plus d’indications possible. »
La mamie réfléchit un instant « Il y a la Mercedes de mon époux garée devant. Elle est verte… »
« Quoi d’autre ? » demanda le conseiller. Puis, enfin, lui aussi se mit à réfléchir. « Le médecin est venu ? »
« Oui, il est venu »
« Mais, il est venu à quelle adresse ? »
« Ben… Il est venu ici. »
Le conseiller funéraire soupira. « Il a laissé le certificat de décès ? »
« Oui, un papier à vous donner… »
« Parfait. Vous l’avez sous les yeux ? Bien. A quelle adresse a-t-il constaté le décès ? »
« Au 35 rue Poincarré. Tiens, c’est là qu’on habite ! »
Le conseiller funéraire soupira, encore « On arrive, Madame ».