Hall Rungis Transformé en Morgue

Tarification de la morgue improvisée à Rungis: gare aux tiers…

Une polémique, une de plus, éclate dans le traitement de ce coronavirus : les familles parisiennes doivent s’acquitter de frais pour le dépôt et la visite des défunts à Paris. Est-ce un problème ? Ca se discute. Ce qui risque de porter à conséquences est ailleurs.

Un problème de place

Du fait du grand nombre de décès durant la pandémie de COVID-19, la Préfecture de Police de Paris, sous la houlette du Préfet Lallement a réquisitionné un entrepôt à Rungis pour déposer des corps, et où les familles peuvent faire, si elles le souhaite, des visites.

Le problème a été soulevé le 8 avril par Sandrine Thiéfine, présidente des Pompes Funèbres de France :  les coûts engendrés par ce dispositif sont élevés, et la facture peut vite atteindre des sommets : 159 euros pour un dépôt de corps pour la durée standard de 6 jours, 35 euros par jour supplémentaire, et surtout 55 euros pour une heure de visite dans un espace réservé (seule possibilité pour se recueillir auprès de son défunt).

Un dispositif qui, à contrario, est justifié pour Didier Kahlouche, co-président de la CPFM. La mise à disposition et les opérations de personnel et de maintenance du site ont un coût, qui doit être répercuté, soit sur les usagers, soit sur l’ensemble des contribuables.

Le débat est ouvert, mais la perception de ces frais par les familles est négative. Cette facturation est mal vécue, et ont peut le comprendre, dans une certaine mesure : il n’y a pas ici de choix entre la gratuité d’un funérarium d’hôpital pour 48 heures si le décès y survient, et les prestations payantes, mais qui offrent une qualité bien supérieure, d’une maison funéraire.

Mais le côté retors de la chose repose sur le choix de la facturation en tiers.

Une place pour les problèmes

Effectivement, le choix retenu pour facturer aux familles est via les pompes funèbres, dans la section des tiers. C’est à dire qu’au lieu d’assumer sa décision, le préfet Lallement détourne l’ire des familles vers les pompes funèbres, pour conserver sa popularité intacte (cette phrase peut contenir de l’ironie).

Mais les gens ont bien compris que c’est l’établissement public qui facture, vous direz-vous peut-être, d’ailleurs la presse fait bien le distinguo. Oui, mais c’est oublier deux facteurs essentiels.

Le premier, la majorité des gens ne lisent que les titres dans les articles. Parmi ceux qui vont plus loin, la majorité, encore une fois, s’arrête au chapeau. Rares, in fine, sont ceux qui lisent l’article en entier et prennent connaissance de tous les éléments. J’en fais l’expérience tous les jours, que ce soit dans les colonnes de Funéraire Actualités ou du Vaping Post.

La seconde, beaucoup de gens cherchent à passer une colère, qu’elle soit légitime ou non, sur des responsables désignés non pas selon une réalité objective, mais sur des préjugés.

Ainsi, quand tel journal titre « Coronavirus, les familles paient pour la morgue improvisé à Rungis », le premier commentaire sous l’article est : « Les pompes funèbres et les supermarchés, toujours les même charognards qui se goinfrent sur le malheur des gens ». Et beaucoup d’autres sont à l’avenant.

Même le responsable politique Nicolas Dupont-Aignan, dans une vidéo où il dénonce le choix fait par le Préfet Lallement, garde une certaine ambiguïté qui pourrait prêter à confusion dans l’esprit de certains.

Il serait peut-être intéressant pour les pompes funèbres de réfléchir à un moyen d’informer les familles qu’ils en font que retransférer sur leur propre facture des frais qui seront acquittés au Trésor Public. Comme de glisser la grille de tarification officielle siglée de la préfecture de police dans les devis et commandes remis aux familles…

Guillaume Bailly

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