Monopole

Vers des monopoles communautaires ?

Récemment, à l’occasion de l’ouverture dans une ville de province de pompes funèbres religieuses, certains professionnels se sont offusqués qu’elles soient recommandées par les autorités ecclésiastiques. Est-ce légal ? Est-ce un problème ? On se penche sur le sujet.

Pompes funèbres de père en Saint-Esprit

En 2002, Monseigneur Lustiger, alors archevêque de Paris, confie à Christian de Cacqueray, ancien salarié d’OGF, la mission de transformer le Service Catholique des Funérailles (SCF), une association visant à aider les familles lors des formalités liées à un décès, en une pompe funèbre à part entière.

La philosophie en est simple : proposer une alternative au funéraire civil, jugé trop commercial et professionnel, en limitant l’offre (un cercueil inhumation et un cercueil crémation au catalogue) et en garantissant un accompagnement complet. Et pourquoi pas ? L’idée, en soi, n’est pas mauvaise.

Longtemps exclusivement parisien, des agences du SCF vont commencer à apparaître dans certaines régions de France. Entre temps, sur un modèle différent, des pompes funèbres musulmanes se sont également créées. Mais tous avaient été précédées par des Pompes Funèbres Israélites, dans des secteurs où la communauté juive était bien implantée.

La particularité de ces pompes funèbres est leur grande spécialisation. Les familles souhaitant des obsèques qui respectent les rites religieux ont un interlocuteur qui, souvent, est un coreligionnaire, et l’accompagnement spirituel se fait à toutes les étapes. Lorsque la religion est importante, pour le défunt ou ses proches, ça compte.

Mais, ici et là, on peut voir apparaître des protestations de pompes funèbres. Récemment, certaines ont découvert, dans une région où le SCF s’était implantée depuis peu, que le site internet du diocèse revoyait vers cette pompe funèbre spécifique, s’interrogeant sur le bien-fondé de ceci.

Pardonne leurs, ils savent ce qu’ils font

Premier point : c’est légal. Une religion n’est pas un service public et a parfaitement le droit de conseiller une pompe funèbre. A condition de respecter quelques point précis.

Le premier est de ne pas le faire à titre lucratif. Imaginons un religieux qui conseille une pompe funèbre communautaire à une famille, et touche une commission en échange. La pompe funèbre serait alors coupable de démarchage commercial, indirectement, ce qu’elle n’a pas droit de faire, et le religieux en question serait complice.

Un lieu de culte n’a pas non plus le droit de conditionner la cérémonie d’obsèques à l’appel par la famille d’une pompe funèbre en particulier. Interdit de dire « vous pouvez avoir une cérémonie à l’église / au temple / à la mosquée / à la synagogue uniquement si vous passez par Tartempion ». Interdit aussi de réserver certains créneaux, surtout les plus convoités, à une PF en particulier. Tout ceci constitue une entrave à la liberté funéraire.

Enfin, en cas de deuil, il est interdit aux religieux d’appeler la famille, par exemple, pour leur dire de s’adresser à untel ou untel. Même si il n’y a pas d’échange d’argent, cela serait considéré comme du démarchage commercial.

En revanche, si la famille se rend de son propre chef sur le site internet des autorités religieuses de son secteur et qu’elle voit une préconisation, ce n’est pas illégale. Spécifiquement sur le SCF, qui a un statut associatif. Ou si la famille demande à son interlocuteur religieux de lui conseiller une pompe funèbre. Là encore, il peut répondre, il n’est pas fonctionnaire et n’a aucun devoir de neutralité. Tant qu’il n’impose pas à la famille de choisir ce service spécifique.

On est bien d’accord, tout cela est sur la corde raide. Mais pourquoi ce développement des pompes funèbres communautaires, et est-ce un problème ? Voilà un sujet qui vaut un article à lui tout seul.

Guillaume Bailly

Commentaire “Vers des monopoles communautaires ?”

  1. Pourquoi? Mais parce que la mort n’est pas juste une histoire de contrat obsèques et d’achat de fleurs à prix exorbitants. C’est un passage spirituel, et souvent douloureux, dans la vie d’une famille et comme dans le cas des coopératives funéraires, trop peu à mon goût, les humains recherchent autre chose.
    Quand on voit le prix que l’on facture pour un soin ou une soi-disant toilette (à sec), on a le droit de se demander si un prestataire plus proche de ses convictions serait plus diligent pour le dernier accompagnement…

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