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La véritable histoire des squelettes de géants

Les géants ont-ils existé ? Et bien oui, vous ne le saviez pas ? Leurs ossements ont même été étudiés par un scientifique très sérieux. Et si cette révélation a laissé le monde bouche bée, c’est parce qu’ils n’avaient pas trouvé la mâchoire.

Il y a comme un os

En 1677, Robert Plot publia un livre, « The natural history of Oxfordshire », qui fit grand bruit dans les petits milieux scientifiques. Il faut dire que Plot n’était pas n’importe qui, et qu’il n’affirmait pas n’importe quoi. Ou tout du moins, il ne le fit pas exprès.

Robert Plot avait une habitude : être le premier. Il fut le premier conservateur du Museum Elias Ashmole (antiquaire, homme politique, et fondateur du Muséum qui porte son nom, lequel muséum devint le pivot du développement de la franc-maçonnerie en Angleterre), le premier professeur de chimie de l’université d’Oxford, et, ce qui nous intéresse, le premier à décrire un os de géant.

Quelques années plut tôt, en Angleterre, avait été découvert un très gros os, qui ne correspond à rien de ce que l’on connaît jusqu’ici. Intrigué, Robert Plot parvient à l’étudier, il en dresse, en bon scientifique qu’il est, une description complète et précise, puis se demande ce que ça peut bien être. L’os d’un gros beuf ? D’un très grand cheval ?

Non : Plot et formel, c’est l’os d’un très, très grand homme. Un géant, pour tout dire. Bon, d’accord, ça ne ressemble pas exactement aux os qu’on trouve dans le corps humain, mais ce sont des géants, ils sont un petit peu différents, logique.

Et on ne se pose pas plus de questions : Robert Plot était un scientifique sérieux et réputé, et puis, surtout, les géants ne sont pas une surprise, il en est question dans la Bible, il n’était donc pas impossible qu’on en découvre les restes un jour ou l’autre. C’est bon, ça valide, une bonne chose de faite, au suivant.

Le suivant arriva en 1824, en la personne de William Buckland. L’homme était tout aussi crédible et respecté que Robert Plot en son temps. Ecclésiastique et géologue, sa rigueur et son sérieux lui avaient permis d’obtenir des postes prestigieux dans les plus grandes universités.

Du moins, sa rigueur et son sérieux dans sa façon de conduire ses travaux scientifiques. Parce que dans la vie de tous les jours, William Buckland était considéré comme un excentrique. Certes, les mauvaises langues objecteront que choisir la géologie comme spécialité est déjà, en soi, la preuve d’un esprit déviant, mais, même selon les critères géologiques, Buckland était spécialement étrange.

Il collectionnait les pierres, cailloux, minéraux de toutes sortes, ce qui, pour un géologue, n’étonnera personne. Mais il en possédait une quantité phénoménale, toujours selon les normes géologiques. Et il avait une autre manie : vouloir goûter à tous les animaux. Incluant dans ceux-ci les insectes. Il avait précisé dans un article écrit à ce sujet que tout être vivant avait des qualités gustatives et nutritives, sauf deux : la taupe et la mouche. Qu’il avait toutes deux mangé, oui.

Et en même temps, William Buckland aimait les animaux, qu’il entretenait en grand nombre à son domicile. Des chiens, des chats, des animaux de ferme, et d’autres plus exotiques. Ainsi, lorsqu’il était professeur à Oxford, il prit pour habitude de dispenser son enseignement avec un de ses animaux de compagnie : un ours.  Mais pas de panique ! L’ursidé était tout à fait domestiqué, et, pour preuve, Buckland lui avait fait confectionner un costume de professeur. Oui, il faisait cours en compagnie d’un ours habillé en prof. A qui il n’avait jamais dit qu’il avait sans doute bouffé un membre de sa famille. La prudence avant tout.

C’était ce genre d’excentrique. Mais on lui passait tout, d’une part, parce que l’homme était fort aimable et ne nuisait à personne, et d’autre part, parce que, dans son domaine, c’était un des meilleurs, à tel point que beaucoup le qualifiaient de génie.

C’est pour ça qu’on l’appela pour lui soumettre une trouvaille : des fragments d’ossements qui ne correspondaient à rien de connu et laissaient désemparés tous ceux qui les avaient observés. William Buckland avait écrit, sur des échantillons similaires, que c’étaient des os de géants, mais on arrivait à une ère de scepticisme, et ça embêtait tout le monde de valider une théorie biblique.

William Buckland releva le défi, d’autant qu’il avait depuis quelques temps commencé à s’intéresser très fortement à une nouvelle discipline, la paléontologie, inventée au début des années 1800 par le français Georges Cuvier. Et lorsqu’il s’intéressait à une discipline, il en devenait rapidement un spécialiste réputé. Non, la qualification de « génie » n’était pas gratuite.

Et les ossements qu’on lui apportait étaient, justement, des fossiles. William Buckland en prit possession, les disposa sur un plan de travail, et, mettant en marche toutes ses méninges, s’efforça de reconstituer la partie de cet animal mystérieux qui se trouvait devant lui. Il avait sa petite idée : la présence de dents lui laissaient croire qu’il s’agissait d’une mâchoire.

Et il y parvint. En 1824, il publia la description complète de ce qu’il démontrait être la mâchoire d’un très grand lézard, qu’il baptisa Mégalosaurus, ce qui signifie « grand lézard ». Pris de passion, il s’enquit d’autres ossements de ce type qui auraient pu être découverts. Il en trouva beaucoup, qu’il se mit à étudier, rejoint petit à petit par d’autres savants.

Ces ossements étaient nombreux et variés, mais semblaient tous dater d’une ère géologique bien antérieure à la nôtre. C’était le désordre, il manquait un nom pour tout cela, et c’est Richard Owen, un zoologiste, qui proposa un nom global : terrible lézard. Ce qui, en bon latin, se dit dinosaure.

Guillaume Bailly

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