pain au chocolat

Les mutuelles et le marché du funéraire

La nouvelle n’a pas fait grand bruit, et pourtant : la mutuelle Prévifrance vient de décider d’investir dans la construction de deux funérariums après avoir acheté une société gérant deux crématoriums. Ce qui pose une question intéressante sur le métier des pompes funèbres.

On dit pain au chocolat

Toulouse est une très belle ville où il se passe des choses intéressantes. Le chef-lieu de la région Occitanie fut, au Vème siècle, la capitale du royaume Wisigoth, puis connut une histoire longue et passionnante qui l’a conduite à devenir la capitale européenne de l’aéronautique, très loin donc des invasions barbares germaniques. Une cité agréable où seul un étrange travers dans le champ sémantique boulanger peut contrarier quelque peu le visiteur.

Toulouse est le siège, entre autres, de Prévifrance, une société qui propose des mutuelles. Fondée en 1943, elle emploie 450 personnes sur 40 agences à travers la France, et dispose d’un portefeuille de 366 000 clients.

Alors, certes, le portrait est quelque peu bucolique, mais, jusqu’ici, aucune raison que cet honorable établissement aie sa place dans les colonnes de Funéraire Actualités. Et pourtant si : en juillet 2021, la mutuelle a acheté 73 % des parts sociales de ACF, une société funéraire originaire, comme elle du Tarn et Garonne, qui gère deux crématoriums. Mais loin de s’arrêter là, Prévifrance a annoncé vouloir investir 2,5 millions dans la construction de deux funérariums.

Ces investissements sont destinés à soutenir l’exécution des contrats obsèques que la mutuelle va proposer à ses clients.

Il est à noter, avant que certains lecteurs ne deviennent chonchon : Prévifrance est un organisme à but non lucratif, qui n’a pas d’actionnaires. Ces investissements ne sont donc pas destinés, techniquement, à grossir encore plus la fortune de quelques uns, mais c’est bel et bien, dans l’esprit de la société,une sorte de continuité : après avoir assuré les soins médicaux, on s’occupe des obsèques. Au pire pourra-t-on reprocher à Prévifrance un léger manque d’optimisme.

Mais cela pose une question intéressante : les pompes funèbres, c’est quoi ?

Ne l’appelez plus chocolatine

Il n’est évidemment pas question ici de demander une définition du funéraire, mais de se pencher sur le statut. Les pompes funèbres sont une activité pleine, un métier à part entière, ou plutôt un ensemble de métiers. C’est un secteur économique spécifique à part entière.

Le cas Prévifrance n’est pas unique : d’autres mutuelles ont déjà investi dans le secteur, mais aussi des banques, des assurances, tous avec le même objectif, assurer la continuité de leur offre produit prévoyance obsèques avec son exécution.

Mais qu’arriverait-il si cela se généralisait ?

Le point problématique n’est pas, contrairement à ce qui vient instinctivement à l’esprit, la liberté du funéraire : le choix de l’opérateur est libre, même en cas de présence d’un contrat obsèques, et il y a fort à parier que si l’adhérent choisit un contrat obsèques proposé par sa mutuelle, c’est volontairement et en toute connaissance de cause. De surcroît, ce droit est garanti par la législation, et pour faire changer une loi, surtout sur le funéraire, il y a un peu de temps…

Mais il y a une question plus cruciale : si, demain, un nombre conséquent, voire majoritaire d’entreprises funéraires, devenaient des filiales d’entreprise dont l’activité principale est autre, cela veut dire que les décisions ne seraient plus prises par des personnes ayant la culture spécifique de ce métier. Cela pourrait avoir un impact, à terme, sur l’ensemble des pratiques funéraires.

Loin de moi l’idée de dire que c’est une bonne ou une mauvaise chose. Dans cet avenir, qui n’est qu’un possible parmi tant d’autres, le bon ou le mauvais peuvent surgir. Mais il y a une chose à laquelle, en revanche, il faut tenir : que le funéraire soit un métier plein et entier, et pas simplement un service parmi d’autres, coincé entre la comptabilité et le marketing.

A voir, donc, comment Prévifrance abordera le sujet, mais ce sera, de toute façon, intéressant et riche d’enseignements.

Guillaume Bailly

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *