Récemment, deux sociétés ont été condamnées pour avoir usés de procédés déloyaux afin de capter la clientèle de familles dans des centres médicaux. Ceci, en Nouvelle-Calédonie. En revanche, en métropole, tout va bien, dormez braves gens.
La 5G du délit
Ça a toujours existé, et c’est mal. C’est mal de la part des sociétés qui le commettent, et c’est tout aussi mal de la part de ceux qui savent, mais ne disent rien. La captation de familles est un des fléaux du funéraire, et, quand on parle de captation, certaines sociétés sont littéralement des antennes 5G de la magouille.
Les méthodes sont toujours les mêmes. Soit une société est mandatée pour s’occuper de la morgue d’un établissement et abuse de cette position pour démarcher les familles, soit elle ne gère rien, mais va distribuer des petites enveloppes à quelques postes clefs pour s’assurer que la famille sera bien orientée vers elle par le personnel.
C’est ce qui permet à une société locale de capter 100 % des décès intérieurs survenant dans un hôpital (un décès intérieur, c’est lorsque les obsèques du défunt auront lieu sur le territoire d’intervention de la pompe funèbre) sans que personne ne se pose de questions, ce qui permet à un directeur de maison de retraite de répondre à une nouvelle société désireuse de venir se présenter « inutile, nous travaillons exclusivement avec XXX », alors que la maison de retraite n’est censée travailler avec personne, puisque c’est la famille qui choisit.
Et, pour ceux qui accuseront le secteur privé, la magouille, c’est ce qui permet à un élu de venir engueuler et menacer une jeune aide-soignante parce qu’elle a laissé trop de familles choisir leur pompe funèbre, conformément à leur droit, au détriment de la régie municipale.
Et ceci, mesdames, messieurs, c’est uniquement ce dont votre serviteur a été directement témoin.
Puisque Funéraire Actualités est aussi lu par des particuliers, c’est à dire des familles susceptibles, malheureusement, de perdre quelqu’un et, possiblement, d’avoir affaire à une pompe funèbre, et puisque ces magouilles sont une des raisons pour laquelle je souffre d’aigreurs d’estomac abominables, laissez-moi vous dire comment c’est censé se passer. Le tout, en deux étapes.
Première étape : on vous annonce le décès.
Deuxième étape : vous téléphonez à une ou plusieurs pompes funèbres de votre choix, et vous vous laissez guider.
Certaines personnes dans des établissements de santé vont peut-être vous dire que c’est compliqué, et que, si vous le souhaitez, elles peuvent se charger pour vous d’appeler une pompe funèbre. D’autres peuvent aussi vous dire que telle société n’est pas terrible, mais qu’en revanche, ils vous recommandent untel. Ce sont des soignants, vous leur faite confiance. Il ne faut pas. Ce qu’ils font est interdit, réprimé par la loi, et si ils outrepassent cela, c’est qu’ils touchent de l’argent, en liquide, pour le faire.
Par exemple, un agent de l’hôpital public qui insiste fortement pour que vous optiez pour une pompe funèbre tombe vraisemblablement sous le coup de l’article 432-11 du Code Pénal. Celui qui définit, et sanctionne, la corruption de fonctionnaire. Il y a dix ans de prison à la clef, c’est loin, très loin, d’être anodin. Dans un établissement privé, c’est un autre délit, mois grave, mais tout de même réprimé.
Donc, si vous êtes particulier et que vous lisez ceci, une chose à retenir : aucun employé, soignant ou administratif, d’un établissement public ou privé, n’a le droit de vous obliger ou juste de vous conseiller de choisir telle pompe funèbre.
En Nouvelle-Calédonie, les deux sociétés ont écopé de très lourdes amendes. Certains métropolitains seront peut-être tentés de gloser en sous-entendant que, dans ces territoires lointains, ils sont un peu en retard. C’est oublier que c’est pareil partout, et, qu’en dénonçant et sanctionnant ces pratiques, la Nouvelle-Calédonie a pris une sacrée longueur d’avance.
Guillaume Bailly