Police

Guerre des polices : la bataille oubliée

La période de Noël, avant le traditionnel bilan de fin d’année, est le moment idéal pour vous raconter des histoires. Mais comme celles-ci sont vraies, forcément, elles manquent un peu de princesses et de châteaux. Néanmoins, elles ont leur charme.

La guerre des polices

« On peut savoir ce que vous faites ? »

Le policier ainsi interpellé releva la tête, fixa son interlocuteur, et esquissa un petit sourire avant de se remettre à sa tâche. « Ça se voit, non ? Je verbalise ».

Son interlocuteur, outré, rétorqua aussitôt « et sinon, ça ne va pas, la tête ? »

Le policier, sans se démonter : « c’est bon, les gars, il ne faut pas vous mettre la rate au court-bouillon. Si vous n’êtes pas fichu de faire votre boulot correctement, ce n’est pas à nous qu’il faut s’en prendre ».

L’autre, en face, était, pour le coup, vraiment énervé. « D’abord, nous, c’est pas ‘’les gars’’, c’est ‘’messieurs les gendarmes’’. Ensuite, vous allez faire demi-tour, et rentrer faire votre paperasse… Fonctionnaire ».

Le masque d’ironie du policier se fendit. Il faut savoir que l’inimitié entre policiers et gendarmes n’est pas vraiment une légende. Policiers fonctionnaires d’un côté, gendarmes militaires de l’autre, les deux institutions… se jalousent. C’est idiot, mais c’est comme ça. Et cette inimitié peut aller très loin, jusqu’au sabotage par les uns du travail des autres dans des affaires judiciaires.

« Et pourquoi, je vous prie ? » le ton était désormais glacial. Les deux collègues du policier, qui jusque là étaient restés en retrait pour savourer la bonne blague, se rapprochèrent, tandis qu’un des collègues du gendarme venait voir ce qui se passait. Le second avait rapidement jaugé la situation et était parti dans leur véhicule.

« Pour deux raisons » entama le gendarme. « La première, vous voyez, le bâtiment, là-bas ? C’est la limite entre zone police et zone gendarmerie. En gros, fonctionnaires » et il appuya fortement le mot « vous n’êtes pas au travail, là, vous êtes en week-end à la campagne en train d’abuser de vos prérogatives ».

Le policier ne se laissa pas démonter « oui, mais bon, si on voit une infraction se commettre en dehors de la zone police, nous pouvons intervenir en flagrance, vous le savez très bien ».

Le gendarme, dont le teint avait pris une jolie couleur rouge, poursuivit « la deuxième raison, c’est qu’on ne vous demande pas grand-chose pour rentrer dans la police, mais vous êtes censés savoir lire, ou au moins déchiffrer. Il y a écrit quoi, là ? ».

Le policier avait accordé son teint, écarlate, à celui du gendarme « non mais dites-donc ! ».

Le militaire, redescendu d’un cran, termina, implacable, « ça, c’est un ‘’P’’, ça c’est un ‘’O’’, ça c’est un ‘’M’’, et ainsi de suite, et mises ensemble, ces lettres et les suivantes disent ‘’pompes funèbres’’, vous savez, les messieurs qui s’occupent des morts, et qui sont en intervention, à notre demande, juste là, c’est nous qui leur avons dit de se garer là ».

Deux évènements se passèrent quasi-simultanément : le gendarme qui s’était réfugié dans la voiture en sortit nonchalamment, en faisant signe à son collègue de se calmer, que c’était géré, et la radio des policiers se mit à cracher, leur intimant l’ordre de rentrer au commissariat sans délais. Les fonctionnaires pâlirent, tandis que le gendarme du véhicule, dans un grand sourire, les acheva « je crois que votre chef a une soufflante à vous passer ».

Le gendarme avait appelé son chef, son chef avait appelé le préfet, le préfet avait appelé le commissaire, et, paraît-il, lui avait mis une telle soufflante que le gradé avait gardé un sifflement dans l’oreille où il avait collé le téléphone pendant une semaine.

Et cette histoire, il faut le souligner, a une conclusion peu flatteuse pour votre serviteur. Parce que, quand la pompe funèbre qui me l’a racontée a fini, la première question que je lui ai posée, c’est « et donc, tu ne l’as pas payée, cette amende ? ».

Note : Nos amis policiers nous pardonneront, nous l’espérons, d’avoir raconté cette histoire arrivée à leur détriment. Ils seront peut-être contents de savoir que, dans la prochaine, c’est la gendarmerie qui en prend pour son grade. N’oublions pas que aussi bien les policiers que les gendarmes risquent leur vie chaque jour pour protéger notre sécurité.

Guillaume Bailly

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *