Femme cimetière parapluie

La Défenseure des droits rend un rapport sur le funéraire

Claire Hédon, la Défenseure des droits, a rendu un rapport sur la législation funéraire, où elle incite à réformer cette dernière afin de s’adapter aux évolutions de la société. Et s’il est de coutume de rire, à juste titre, des suggestion faites par des théoriciens qui ne connaissent rien à la réalité du métier, force est de constater que Mme Hédon a très bien travaillé son sujet et qu’elle a raison.

Société, tu m’auras pas !

« Le monde a changé. Je le vois dans l’eau, je le ressens dans la terre, je le sens dans l’air » comme disait Galadriel dans l’introduction du Seigneur des Anneaux (le film). Oui, le monde a changé et à une plus petite échelle, la société français aussi. Mais le droit funéraire est resté le même, ce que souligne la Défenseure des droits, Claire Hédon.

Elle vient de rendre un rapport intitulé « Des droits gravés dans le marbre ? La personne défunte et ses proches face au service public funéraire » qui, sur 43 pages, fait un état des lieux de la législation et s’intéresse tout particulièrement au respect des volontés du défunt et aux droits de ses proches.

A noter que le rapport vise « le service public du funéraire », et cela peut causer un malentendu. Ce  dont la Défenseure des droits parle, c’est la partie administrative du funéraire, les interactions avec les services missionnés pour appliquer et superviser l’application du droit et pas ce qu’on appelle, nous, « service public », à savoir les régies municipales.

Ce que constate globalement Mme Hédon, c’est que la société a vécu des changements drastiques. Le PACS, puis le mariage pour les couples de même sexe, mais bien avant cela, l’explosion des divorces, les familles recomposées, et que, dans le même temps, le corps de la législation funéraire s’est vu appliquer des petites modifications, sans commune mesure avec les bouleversements induits par ces mutations sociétales.

Elle fait d’ailleurs observer que le fondement du droit funéraire remonte à Napoléon. Comme beaucoup de lois, d’ailleurs, qui proviennent du fameux Code Civil. Mais la France de l’empereur, qui vient juste après la Révolution, était une société très différente de celle d’aujourd’hui.

La défenseure des droits en action

Le défenseur des droits, actuellement Claire Hédon, est une autorité administrative indépendante, nommée pendant six ans. Sa mission est de défendre les droits des citoyens face à l’administration. Depuis sa mise en place, le service a permis de débloquer bon nombre de dossiers sans passer par la case justice.

Une autre mission du Défenseur des droits est de formuler des observations, à travers des rapports, destinés à faire des ajustements entre le droit « théorique » et son application dans la vie quotidienne. D’où cette publication.

Sur une quarantaine de pages, la défenseure des droits souligne les dysfonctionnements du droit funéraire, les inégalités qui peuvent être générées par lui et les évolutions de la société qu’il n’a pas suivi. Elle souligne d’ailleurs que cette idée est venue en constatant que ses services étaient régulièrement saisis par des familles.

Il ne s’agit pas de proposer une réforme des pompes funèbres, mais de la réglementation funéraire, ce qui impactera la profession et ôtera une épine du pied de bien des assistants et conseillers funéraires qui se trouvent régulièrement désemparés face à une situation qui semble inextricable.

Des suggestions de bon aloi

Ainsi, elle se penche par exemple sur les concessions en terrain commun, en demandant une uniformisation nationale des pratiques, en définissant le seuil de ressources pour accéder à la prise en charge des obsèques d’indigents et en informant plus correctement sur les crémations administratives.

Autre sujet, les concessions. La défenseure des droits propose d’assouplir la législation des concessions, en ouvrant plus largement l’accès aux « étrangers à la famille », ce qui simplifierait l’accès aux conjoints non mariés, par exemple. Dans la même idée, revoir la notion de concessionnaire et de co-concessionnaire, afin d’alléger la responsabilité des communes et de laisser plus de latitude aux ayants-droits.

Enfin, harmoniser au niveau national la notion de décideur, la ou les personnes qui peuvent prendre en charge les obsèques.

Le rapport suggère également une mue du statut du défunt, passant du corps « objet » à celui de personne pour renforcer le droit au respect de ses volontés essentielles.

Nous ne saurions trop vous encourager à lire l’intégralité du rapport. Il est globalement équilibré, les constats y sont lucides et la plupart des suggestions pertinentes. Il se lit de surcroît très bien, hormis ici où là quelques tournures jargonnantes qui n’empêchent en rien la lecture. Même si tout n’est pas forcément bon à prendre, il ouvre de toute façon des pistes intéressantes.

Reste à voir les effets que produiront ce rapport s’ils en produisent. Sa publication, à quelques mois d’une élection présidentielle qui occupe tout le monde, est, en effet, stratégiquement aléatoire.

Lien vers le rapport : https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/rap-fun-num-26.01.21.pdf

Guillaume Bailly

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