L’Ecosse est sans doute un des plus beaux pays au monde. Son histoire est riche, et, si ses traditions culinaires sont particulières, il a exporté une invention dans le monde entier avec un certain succès : le whisky. Et celui-ci s’est retrouvé au coeur d’une tradition funéraire. Une jolie histoire de Noël.
Trafic de liqueur
Les débuts de la distillation du Whisky n’ont pas été de tous repos, et, très vite, l’occupant anglais s’est dit que, puisque tout le monde en consommait, le taxer serait bien.
Et c’est ainsi qu’apparut le corps des excisemen, sorte de douaniers volants chargés d’intercepter les chargements de whisky qui n’avaient pas acquittés leur dû. En face, des Highlanders écossais qui défendaient âprement leurs traditions et, un peu, leur réputation de radins.
Comme l’histoire se passe en Ecosse, même si ils se livraient, sur le terrain, une guerre impitoyable, qui pouvait aller jusqu’à la mort, après leur journée de labeur, ils entretenaient souvent des relations empreinte de respect, voire amicales. Du moins, lorsque l’excisemen était également un highlander.
Un jour, un fraudeur et un exciseman discutaient, et ce dernier dit au distillateur : « tu sais, j’ai reçu des ordres, on sait que tu trafiques, j’ai pour consigne de te coller et de te prendre sur le fait ».
Le highlander répondit : « je te remercie de ton honnêteté. En échange, je vais te donner une information : demain, je ferais passer un chargement de whisky sous tes yeux. Nous partirons de Bauly pour aller à Inverness entre 5 heures du matin et 9 heures du soir ».
Le lendemain, évidemment, l’exciseman était au rendez-vous, avec une troupe d’hommes d’armes anglais. La circulation était importante, et des chariots passaient chargés, soit de foin, soit de navets, parfois de laine, voire d’animaux vivants. Chacun fut fouillé avec le plus grand soin. Alors que, dans l’après-midi, un convoi funéraire passait, ralentissant au passage la circulation, et que chacun se découvrait respectueusement, un chariot d’avoine chercha à forcer le passage. Les homme d’armes parvinrent à l’arrêter, et il fut fouillé, presque démonté. Mais rien. Les hommes de l’exciseman rentrèrent bredouilles.
Le contrôleur, le soir, avisa le contrebandier, et, furieux, lui dit « dis donc, tu t’es bien fichu de moi ! Je t’ai donné des infos, et, en échange, tu t’es payé ma tête, avec cette histoire de chargement de whisky ».
Et le contrebandier répondit : « pas du tout, j’ai effectivement fait passer un chargement de whisky juste sous tes yeux. Tu t’es même découvert à son passage ».
Une jolie tradition
vers le XVIIIèle siècle, en Ecosse, le whisky était tellement ancré dans la coutume écossaise qu’il aurait semblé incongru qu’il soit absent des funérailles.
La tradition était la suivante : lorsqu’un highlander sentait qu’il se rapprochait de l’heure de sa mort, il devait faire provision de whisky. Il fallait qu’il y en eût suffisamment pour qu’aucune personne assistant aux obsèques n’aie soif. Et il n’était pas question ici d’attendre que l’enterrement aie eu lieu… Vous les voyez venir, les ennuis ?
Ainsi, les annales funéraires écossaises sont plein d’histoires, certes un tantinet répétitives, mais toujours amusantes. Ainsi, sur l’île de Lewis, lors des obsèques d’une certaine Margaret, les porteurs qui se relayaient se disaient que la pauvre avait vraiment perdu beaucoup de poids, à la fin. Ce n’est qu’au retour du cimetière, retrouvant la principale intéressée dans son lit, qu’ils se rappelèrent avoir oublié de faire la mise en bière.
Un autre convoi, nous explique la tradition populaire, arriva au cimetière sans que personne ne se rende compte qu’ils avaient oublié le cercueil et son occupant à la maison…
Les soldats anglais, qui surveillaient les velléités indépendantistes écossaises, rapportaient, lors de leur retour au pays, que les obsèques écossaises étaient plus joyeuses que bon nombre de mariages anglais.
Besoin d’une idée cadeau ? « La petite histoire du whisky » de Martine Nouet, éditions Librio, 5 euros, contient toute l’histoire du breuvage et bon nombre d’anecdotes sympathiques, dont un chapitre consacré aux obsèques.
Guillaume Bailly