L’écologie est dans l’air du temps, et les obsèques ne font pas exception à la règle. Si ce mouvement est louable et mérite d’être encouragé, certains écueils dans la façon de le présenter pourraient l’entraver. On vous dit tout.
L’écologie à la mode
Combien de journées se sont passées sans que vous ayez entendu parler de climat depuis, disons, deux ans ? A moins que vous ne soyez totalement coupé du monde et de l’actualité, la réponse est environ zéro. Le sujet est préoccupant, il fait la une tous les jours, et, forcément, de plus en plus de personnes se sentent concernées.
A toutes les échelles, d’ailleurs. Récemment, le comédien Luke Perry nous a quittés, et il avait, lorsqu’il s’est su condamné par le cancer, opté pour des obsèques entièrement écologiques. Même son costume était constitué de fibres de champignons biodégradables. Très engagé dans le mouvement écologiste, Luke Perry a eu des obsèques fidèles à ses convictions et son mode de vie.
Yann Arthus Bertrand, également, fait savoir ces jours-ci, à grands renforts de presse, qu’il prépare des obsèques écolo lorsque son décès surviendra. Il a même acheté un cercueil biodégradable qu’il entrepose chez lui. L’homme s’est fait connaître grâce à ses photographies prises d’hélicoptère, un moyen de transport très polluant. Un acte de contrition ?
Sans aller jusque là, l’écologie est une préoccupation de plus en plus présente chez certaines familles qui font appel aux pompes funèbres. Certains remportent un vif succès en proposant, par exemple, des cercueils en carton, d’autres proposent des convois à cheval, surfant à la fois sur la nostalgie et le bilan carbone. Tout cela est très bien, mais…
Religieuses, civiles, écolos…
Le danger se profile à l’horizon : les obsèques écolo. Vous ne voyez pas ?
Jusqu’ici, nous avons deux types d’obsèques. D’un côté, les obsèques religieuses, quelle que soit la religion. Tout professionnel qui se respecte sait conduire un convoi catholique, musulman, israélite… Qui est choisi par les familles d’un défunt croyant, dont c’était le souhait.
De l’autre côté, les obsèques civiles. Là encore, un bon Maître de Cérémonies pourra facilement organiser un convoi personnalisé pour le défunt, en n’hésitant pas à faire preuve de créativité.
Et voilà qu’arrivent les obsèques écolo. La communication de certaines pompes funèbres mettent en avant cet aspect bio, au bilan carbone faible, respectueux du défunt et de la planète. En quoi est-ce une mauvaise idée ?
Et bien, paradoxalement, c’est se priver d’un argument massif pour en faire un marché de niche.
A la niche, écologie !
Il convient en effet de ne pas laisser apparaître un troisième type de convoi, qui sonnerait le choix entre des obsèques civiles, religieuses ou écologiques. Parce que cet argument vert, qui pourrait emporter l’adhésion de certaines familles, pourrait paradoxalement devenir un repoussoir pour certaines autres qui croiraient devoir choisir.
Nous sommes bien d’accord : il s’agit ici purement de communication. Mais il ne faudrait pas, en voyant une affiche mettant en avant un convoi « bio », qu’une famille se dise « ah non, ce n’est pas pour nous, nous on va à l’église ».
Mettre l’argument « vert » en avant sur l’ensemble de la société est une excellente idée, à condition bien entendu qu’elle soit suivie d’effets. Le « green washing » est extrêmement mal perçu.
C’est toute la différence entre des « obsèques écolo », que les familles percevront comme une prestation optionnelle ou un convoi particulier, et une pompe funèbre écolo, qui s’efforce de réduire son empreinte carbone sur les obsèques civiles et religieuses. Plutôt que de solliciter la famille pour entrer dans une démarche militante, le lui proposer comme un bonus qui, pour elle, ne change rien.
L’objectif final n’étant pas de passer du noir du deuil au vert militant, mais de faire intelligemment cohabiter les deux.
Guillaume Bally