Une proposition que l’on voit réémerge de temps à autres est d’obliger les candidats aux écoles du funéraire de passer une semaine avec un thanatopracteur. Une idée pleine de bon sens, mais totalement inaboutie.
Le chemin de l’école
C’est un article qui a été partagé sur un groupe Facebook, provenant de Ouest France, mais dont la date n’était pas visible : Jean-Pierre Sueur, sénateur et sans doute l’homme politique le plus concerné par les métiers du funéraire, suggérait que les jeunes souhaitant entamer une formation dans une école du funéraire passent une semaine à suivre un thanatopracteur pour voir si, dans un premier temps, côtoyer la mort ne les dérangerait pas.
Et c’est une bonne idée. Mais incomplète.
En effet, côtoyer la mort est un indispensable dans ce métier, mais se contenter de l’activité de thanatopracteur est très insuffisant. Cela ne donnerait qu’une vision partielle du défunt, oblitérant de nombreux autres aspects du métier.
Il serait également bien de prévoir un stage auprès d’un conseiller funéraire, afin de constater que la pression psychologique est intense.
Tenez, rien ne vaut une anecdote pour illustrer. Un samedi, je travaillais pour donner un coup de main dans une boutique de cigarette électronique. C’était calme, et une cliente, une habituée, entra. Elle portait le deuil récent de son fils (qui avait environ 35 ans), et la conversation avait glissé là dessus. Pendant une demi-heure, elle s’épancha, elle en avait besoin, puis partit. Je constatai alors que mon collègue, l’autre vendeur, était ému aux larmes.
Il s’étonna lui-même que je ne semble pas affecté, et je lui expliquai que, pendant quinze ans, ce genre de scènes avait été mon quotidien. Sa réponse « Mais comment tu es arrivé à faire ce métier ? ».
Il n’y a pas que le contact des morts qui ronge les plus fragiles, aux pompes funèbres. Il y a cette pression constant que font peser le deuil, la douleur et les regrets des familles, autant de sentiments puissants susceptibles de ronger petit à petit celui qui n’est pas capable de passer outre.
Et n’oublions pas les circonstances. Supporter l’atmosphère d’une salle de thanatopraxie ne garantit absolument pas que l’on supportera un suicide violent dans un taudis, ou une recherche de morceaux manquants à l’aube sur une route ou une voie ferrée.
Et on en oublie.
Mais l’idée est là : effectivement, avant d’entamer une formation, quelle qu’elle soit, dans le domaine du funéraire, il serait bien que bon nombre d’impétrants aient une vision juste du métier qui ne peut être acquise que sur le terrain. Ça permettrait aussi à certains d’apprendre que tout ne tourne pas autour de la thanatopraxie.
Guillaume Bailly