Les gants en latex : qui aujourd’hui, que ce soit dans le secteur funéraire ou de la santé n’en utilise pas ? Mais ces indispensables n’ont pas toujours été de soi. Et l’histoire de leur invention est surprenante.
L’amour avec des gants
L’amour est-il plus fort que la mort ? Peut-être. En une occasion au moins, cet adage se vérifia, et continue de se vérifier aujourd’hui. Aussi improbable que cela puisse paraître, l’amour de William et Caroline vous a sans doute sauvé la vie.
En 1880, William Halsted devient chirurgien à New York après un cursus brillant mené tant aux Etats-Unis qu’en Europe pour parfaire sa formation. Le jeune homme est extrêmement brillant, mais il est sous surveillance : en effet, il est accro.
Cocaïne dans un premier temps, puis morphine, Halsted serait qualifié aujourd’hui de junkie, ce qui n’empêche pas le médecin d’exercer une carrière exceptionnelle. Il faut dire qu’à l’époque, ce genre de « petit plaisir » n’est pas illégal, simplement très mal vu.
William Halsted se sait toutefois sous surveillance de sa hiérarchie, aussi, par souci de ne pas faire de vague, il tait sa passion. Il est en effet tombé éperdument amoureux de l’infirmière qui l’assiste en salle d’opération, Caroline Hampton. Il se satisfait des instants qu’il parvient à passer à ses côtés en opérant.
Mais un jour, Caroline vient lui annoncer qu’elle ne pourra plus rester à ses côtés : elle a développé une allergie aux antiseptiques qui sont utilisés durant les opérations. Il faut dire que les soignants sont particulièrement exposés : toute la médecine s’effectue à mains nues. Et ces mains là, on ne se les lave pas depuis très longtemps.
Le coeur de William Halsted se brise, mais l’homme opiniâtre veut trouver une solution : hors de question de laisser Caroline partir loin de lui. Il a alors une idée : l’ami d’un ami dirige une compagnie dont la spécialité pourrait peut-être lui servir.
Et c’est ainsi que William Halsted, entre en 1889 dans le bureau d’un importateur en caoutchouc qui dirige une petite société du nom de Goodyear (qui n’est pas la Goodyear que nous connaissons aujourd’hui, société fondée elle en 1898) pour lui commander une paire de gants. L’idée est de protéger caroline des antiseptiques afin qu’elle puisse continuer à opérer à ses côtés.
Plus tard, Halsted, qui entre temps a pris connaissance des travaux de Pasteur et Semmelweis (mais ceci est une autre histoire) se met lui aussi à porter des gants pour protéger ses patients. Il en généralise l’usage dans son bloc et constate une amélioration des résultats.
Halsted a par la suite inventé de nombreuses techniques de chirurgie notamment sur le contrôle des saignements (toujours utilisés aujourd’hui sous le nom de principes de Halsted), fait des avancées dans le traitement du cancer du sein et l’anévrisme vasculaire.
Quant à Caroline, elle continua de l’épauler tant au bloc opératoire grâce à ses gants en caoutchouc, que dans la vie, puisque William et elle finirent par se marier en 1890. Halsted mourut en septembre 1922, et Caroline le suivit deux mois plus tard.
Guillaume Bailly