Si une épidémie majeure de Coronavirus venait à éclater en France, les professionnels du funéraire seraient en première ligne. Ou en sommes-nous ? Faut-il s’inquiéter ? Et, le moment venu, que faudra-t-il faire ? Un point sur la situation.
Covid-19, ravi de vous connaître
La première chose à faire, c’est de définir précisément de quoi on parle. On a pu, un peu partout, lire, voir et entendre des choses sur cette maladie qui peuvent semer le trouble, y compris au sein des professions du funéraire, qui seraient particulièrement exposées en cas de crise majeure mais ne disposent pas d’un accès à l’information aussi précis et ciblé que celui des professions médicales.
La première chose à savoir, la maladie n’est pas le coronavirus. « Coronavirus » ne désigne pas UNE maladie, mais une famille de virus à Arn monocaténaire. Ils sont connus depuis longtemps. Le SARS-Cov-2, virus qui inquiète actuellement, fait partie de la famille des coronavirus, mais a bien été découvert fin 2019.
Aussi n’est-il pas étonnant de trouver des produits désinfectants antérieurs à 2019 qui signalent être efficace contre les coronavirus : la famille est connue depuis longtemps, mais le petit dernier n’était pas encore fiché. Un exemple type est la grippe : on connaît la grippe depuis des siècles, mais la souche qui apparaît chaque année est imprévisible, d’où la difficulté de développer le vaccin.
Ensuite, le virus et la maladie sont deux choses différentes. Le virus SARS-Cov-2 provoque chez l’homme la maladie désignée sous le nom de Covid-19, abréviation de Coronavirus Disease 2019. On peut porter le SARS-Cov-2 et ne pas développer le Covid-19, auquel cas on est un « porteur sain », c’est à dire que l’on n’est pas malade soi-même mais qu’on peut le transmettre. C’est ce que nous dit, en tout cas, la théorie.
Cette notion est assez facile à comprendre, l’exemple le plus connu étant le HIV. Le VIH (virus de l’immunodéficience humaine) provoque le SIDA (syndrome d’immunodéficience acquise) mais il n’est pas le SIDA. Tout l’enjeu des traitements actuels pour les patients atteints de HIV consiste à empêcher le virus de déclencher la maladie.
D’accord, toutes ces préoccupations sont bien éloignées d’une action concrète sur le terrain en cas de propagation massive. Mais le savoir, et le comprendre, permet d’éviter la propagation d’une autre maladie, la désinformation, qui pousse à l’erreur.
Ce que l’on sait d’un point de vue funéraire
Le SARS-Cov-2, malgré son nom, n’est pas un SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère), ce qui a d’ailleurs causé une petite querelle scientifique lorsque l’OMS a choisi ce nom.
Concrètement, cela veut dire qu’il n’est pas concerné par les dispositions du second groupe de maladies listé par l’arrêté du 12 juillet 2017 au titre de l’article R. 2213-2-1 du code général des collectivités territoriales. En d’autres termes, les soins de conservation ne sont pas systématiquement interdits et la mise en bière immédiate ne se fait pas non plus d’office.
Tout cela peut se faire sur arrêté du Ministre de la santé, pris après avis du Haut conseil de la santé publique… A condition qu’il y pense. On peut imaginer une situation ubuesque, comme un Ministre de la santé qui quitterait son poste en pleine crise pour aller concourir à une élection municipale, et son successeur, aussi motivé et compétant soit-il, qui devrait reprendre ses dossiers un dimanche soir au débotté. Heureusement, ça n’arrive jamais, dans la vraie vie, n’est-ce pas ? Non, ne répondez pas, je préfère ne pas le savoir…
Tout cela pour dire : si vous êtes confronté au cas, pensez à bien vérifier que le médecin a au moins interdit les soins de conservation, et faites lui comprendre qu’exposer le corps à la famille n’est peut-être pas une riche idée, et qu’une mise en bière immédiate serait bien pour éviter tout problème. Non pas que les médecins n’en soient pas conscients, simplement qu’en cas de crise, avec des dizaines de patients à gérer, la mémoire peut évacuer le secondaire. Et un patient mort, pour un médecin, devient secondaire par rapport à un patient vivant qu’il faut sauver.
Au pire, l’arrêté du quatrième groupe du 12 juillet 2017 pourra au moins permettre d’interdire les soins de conservation. Il porte sur la définition très large de « tout état septique grave ».
On ignore également combien de temps après le décès le SARS-Cov-2 survit hors du corps. Une chose est sûre : on n’est pas sur une fièvre hémorragique type Ebola, ni sur le SRAS (la maladie, cette fois-ci). Inutile donc de sortir les combinaisons NBC.
La mise en bière éventuelle d’un malade décédé du Covid-19 pourra se faire avec des précautions de contact assez classiques en cas de maladie infectieuse. Gants, blouse, désinfection après avoir procédé, et vous êtes tranquille. Seul ajout, un masque type FFP1 minimum, qui protège contre les infection aéroportées. Sans doute superfétatoire, cette précaution est tout de même préférable dans le doute, et son côté rassurant peut avoir un effet bénéfique sur des équipes très sollicitées et stressées.
Ce qu’il faut retenir, au final, sur cette crise épidémique, que vous soyez professionnel du funéraire ou pas : ce n’est pas la fin du monde, on va s’en sortir. Mais surtout, si vous voyez des informations alarmantes, ne les prenez pas au pied de la lettre, ne remettez pas en cause la compétence des scientifiques, en un mot, ne jouez pas votre vie sur un coup de dé : vérifiez, recoupez les sources, assurez-vous de leur fiabilité. Et cela pour tout, y compris pour cet article.
Sources :
- Ministère de la santé (France)
- Légifrance (France)
- Institut Pasteur (France)
- Journal International du Médecin (France)
- Organisation Mondiale de la Santé (OMS – Monde)
- Center for Disease Control and Prevention (CDC – USA)
- Institute of Biogen Pathology (Chine)
Guillaume Bailly
Commentaire “Un coronavirus dans le cercueil ?”